Mamaskatch: une initiation crie by McLeod Darrel J

Mamaskatch: une initiation crie by McLeod Darrel J

Auteur:McLeod, Darrel J [McLeod, Darrel J]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
ISBN: 9782896498307
Éditeur: VLB éditeur
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


Les princesses indiennes

Le jour où maman trouva la lettre de Greggie, j’avais couru jusqu’à la maison joyeux et excité, loin d’être préparé à la scène qui m’attendait. Je comptais m’exercer à la trompette, pour le festival Kiwanis qui approchait, avant l’arrivée des petits. Comme d’habitude, je comptais souffler dans mon instrument de toutes mes forces autant de fois qu’il le faudrait pour réussir à jouer les mélodies.

Maman était assise au pied de l’escalier. Elle tenait une enveloppe dans une main et des feuilles dans l’autre. Éparpillées sur la marche derrière elle, quelques bandes de photos en noir et blanc, le genre que nous aimions prendre dans la cabine à la gare d’autobus d’Edmonton et qui coûtaient vingt-cinq cents le jeu de quatre. Je m’approchai et en ramassai une. Mon grand frère Greg et mon oncle Danny étaient collés l’un contre l’autre et souriaient. Ils portaient du rouge à lèvres brillant, des perruques bouffantes et des chemisiers décolletés. Oh. Oh, elle avait trouvé la lettre.

Mon cœur sombra. Deux semaines plus tôt, j’avais ouvert une lettre de Greggie et je l’avais cachée dans les plis des chemises que je rangeais dans mon garde-robe improvisé. Je redoutais la réaction de maman à sa lecture, craignant qu’elle fasse une sorte de dépression nerveuse ou qu’elle s’évade dans les beuveries et la fête pendant des jours.

— Ooooh. Tu l’as trouvée, m’man. J’allais te la donner. J’attendais seulement le bon moment.

Je lui pris la feuille des mains et relus la première ligne. Les fioritures caractéristiques de l’écriture de Greg me faisaient sourire, en dépit du contenu de la lettre: «Je m’appelle Trina maintenant, maman. J’espère que tu pourras m’aimer pour qui je suis. Je t’aimerai toujours.»

— Ça va… Il fallait bien que je l’apprenne d’une façon ou d’une autre, marmonna maman. Je pensais pas que ça serait comme ça, par contre. J’peux pas croire. J’peux pas croire. Sosquats.

— Je sais, maman, dis-je en retenant mes larmes.

— Il était ici pas plus tard qu’à Noël. J’me disais qu’il avait quelque chose de changé, mais il était habillé normalement, dit maman. Et là il nous dit qu’il a des chochos… Il prend des hormones pour les faire pousser.

Elle posa son front dans ses paumes et se balança d’avant en arrière. Je m’assis à côté d’elle et pris une de ses puissantes mains dans la mienne.

— Sey-neur, il a seulement dix-neuf ans, dit-elle avant de se taire un moment et de me regarder dans les yeux. Il faut qu’on l’a-septe, mon garçon. Ça fait rien. On peut pas le rejeter.

Je rassemblai l’enveloppe et les photos et les replaçai dans mon garde-robe.



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